Une fille raconte la greffe de sa mère - Pour le Don d’Organes et de Tissus Humains
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Une fille raconte la greffe de sa mère

En 2 temps, Sylvie raconte la maladie de sa mère, puis la greffe.

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« Je souhaiterais témoigner de ce que ma famille a vécu comme événement important il y a bientôt 3 ans après 20 ans de combat contre la maladie. Dès que le mot greffe est prononcé, le malade est bien préparé et suivi par le personnel médical, les autres greffés. Mais et la famille ? Le conjoint et les enfants ? Ce n’est peut-être pas non plus le rôle de l’hôpital. En consultation pré-greffe, le malade ne va pas arriver avec toute sa tribu.

 

Cette greffe est un tel bouleversement pour tout le monde. Cette nouvelle vie qui redémarre, un tel chambardement, qu’il faut  “reconstruire ” toute la cellule familiale, qui pendant 20 ans c’était centralisée sur le malade.  

 

Dans quelques semaines, nous allons fêter les 3 ans de maman et les 33 ans de mariage de mes parents. Vous avez bien lu : “ les 3 ans de maman ”.

 

 

Il y a 3 ans, une maman perdait son enfant et deux enfants voyaient la vie de leur maman se prolonger grâce au don d’organe. Nous tenons tous les quatre à fêter cet anniversaire : une façon de rendre hommage au donneur et à sa famille. Comme nous sommes croyants, une messe d’action de grâce est dite pour maman, le donneur et sa famille le jour anniversaire de l’opération.

 

Maman a combattu la maladie pendant plus de 20 ans. Elle a essayé plusieurs traitements dont certains ne lui ont pas été forcément bénéfiques. Depuis l’âge de 10 ans, j’ai vu maman de plus en plus souvent alitée, de plus en plus souvent affaiblie, mais gardant toujours le sourire et une rage de vivre incroyable. Les dernières années, avant la greffe, furent assez difficiles. Nous voyions maman s’affaiblir de plus en plus tout en ne pouvant rien faire pour elle. Ma sœur et moi passions le plus de temps possible en sa compagnie afin d’engranger le plus de souvenirs. Combien d’après-midi passés dans sa chambre sur son lit à discuter avec elle malgré le beau soleil et l’envie parfois de sortir, je ne saurais le dire. Mais, je n’en regrette aucun. Bien au contraire. Aucun sujet n’était tabou.  Les discussions n’étaient peut-être pas aussi vives qu’en temps normal entre parents et adolescents. L’éducation des enfants n’est pas toujours aisée : nous n’étions pas des anges ma sœur et moi. Des conflits avec nos parents, il y en a eu.

 

La famille a évolué au rythme de maman. Papa, ma sœur et moi, avons pris chacun notre part de la gestion de la maison : ménage, courses, lavage du linge, repassage, les repas du soir. Même lorsque nous sommes parties pour la FAC, loin de la maison, nous avons continué à jouer notre rôle le week-end et pendant les vacances.

 

Puis un jour, la nouvelle tombe, la greffe est envisagée mais seulement si les examens le permettent et si le nouveau traitement réussi ! Maman est partie dans l’aventure avec un enthousiasme renouvelé, elle avait retrouvé le goût de vivre qui l’avait abandonné depuis quelques mois. Nous, je dois l’avouer, étions plutôt réservés voire pessimistes. Nous avions peur du verdict final. Et pourtant, comme maman a eu raison d’y croire.

 

Deux mois après sa mise sur la liste d’attente, elle rentrait en salle d’opération : la veille du 30 ème anniversaire de mariage de mes parents. Joli cadeau de la vie. L’attente ne fut pas facile : 2 appels pour rien. Nous n’osions pas trop y croire. Sauf bien sûr maman. Quels événements marquants n’avons nous pas vécus :

pucebleu l’attente pendant les 12 h d’opération
pucebleu 
la semaine de soins intensifs avec les précautions à prendre pendant les visites
pucebleu 
les 5 semaines d’hospitalisation avec mon papa à la maison.

Il allait tous les jours voir maman. Nous discutions tous les soirs ensemble pour donner des nouvelles, évacuer le côté stressant et angoissant de l’hôpital. Après l’opération, nous étions entrés dans une phase “ euphorique” vu que maman surmontait bien l’opération. Son hémorragie nous a plutôt abattu. En discuter le soir, nous faisait énormément de bien.

Puis, un superbe jour de Noël, maman était sortie d’affaire. Elle pouvait de nouveau manger. Quel festin : jambon mouliné et purée. Elle en parle encore avec beaucoup de fierté et d’émotion. Un beau souvenir que ce jour-là même si nous avons passé Noël à l’hôpital.

Au bout de 5 semaines, elle est rentrée chez elle. Quelques semaines plus tard, j’ai passé un week-end chez mes parents. Quelle ne fut pas ma surprise de voir maman en super forme. Nous avons fait les courses toutes les deux comme souvent lorsque je rentrais à la maison. Je me suis rendue compte que j’ai passée tout mon temps à m’inquiéter pour elle, à la chercher du regard, à vérifier qu’elle allait bien, qu’elle ne souhaitait pas rentrer. Au terme d’un après-midi bien chargé, ce qui ne nous était pas arrivé depuis bien longtemps, j’étais bien plus fatiguée qu’elle. Quelques jours plus tard, à un bal de mariage, j’ai beaucoup dansé avec ma maman. Je ne l’avais pas fait depuis mon adolescence !!

La pleine forme de maman fut difficile à accepter, je dois l’avouer. Ma place dans la famille n’était plus la même. Maman avait repris la gestion de sa maison et il n’était plus nécessaire de s’inquiéter pour elle. Tout allait très bien. Le « choc » fut un peu difficile à surmonter.

Je suis heureuse car nous avons d’autres relations toutes les deux. Je n’étais pas préparée à une telle renaissance ni à une telle vitesse. Depuis nous sommes partis en vacances ensemble : randonnées en montagne au programme. Les randos ont duré de 3h au début pour finir par 6h de marche à la fin de nos 15 jours de vacances. Quel changement !! Ma sœur a créé sa famille : un gendre et une petite fille sont venus enrichir notre cercle. Mes parents se déplacent sans façon chez l’une ou chez l’autre. Au bout d’un an, nous avons pu retrouver nos marques, nous habituer au nouveau caractère de maman. Elle, qui servait de médiateur avant, s’enflamme beaucoup lors des discussions. Et c’est peu de le dire.

 En conclusion, je souhaiterais tout simplement dire merci :

pucebleu tout d’abord aux médecins qui ont suivi maman depuis 20 ans
pucebleu 
puis aux médecins et personnels hospitaliers qui se sont occupés d’elle pendant la suite de greffe.

Je souhaiterais dire merci à la famille du donneur.

Une deuxième vie commence ! Qu’elle dure le plus longtemps possible ». 

Voilà ce que j’écrivais il y a 6 ans déjà : et oui début décembre maman aura 9 ans. Que de chemins parcourus depuis avec ses joies et ses inquiétudes. Maman est toujours là avec son sourire et sa joie de vivre. Elle a du surmonter un cancer du sein et en même temps que la chimio une intoxication alimentaire grave ayant nécessité une semaine d’hospitalisation. Grâce au travail des différentes équipes médicales réparties sur les 3 hôpitaux qui suivaient maman pour suivi de greffe, chimio, et l’intoxication, maman s’en est sortie sans dommage pour la greffe.

La famille s’est agrandie d’une nouvelle petite fille et maman profite de ces instants privilégiés avec ses filles et petites filles. Elle est là pour s’occuper de papa lorsque qu’il est malade.

Tous les ans, nous pensons au donneur et à sa famille : c’est un anniversaire important pour nous. Nous n’oublions pas le personnel médical qui a suivi maman pendant sa longue maladie, sa greffe, et qui la suit aujourd’hui pour le suivi de la greffe et de son cancer du sein. L’année prochaine, maman aura 10 ans et mes parents fêteront leurs 40 ans de mariage. Nous espérons tous pouvoir faire la fête avec la famille et les amis à l’occasion de ce double anniversaire.

Il y a 6 ans, maman était moins patiente et s’enflammait pour un rien. Il a fallu que toute la famille s’adapte à ce changement de caractère radical.  Heureusement, ce fut temporaire.

Ma sœur et moi essayons de lui ressembler pour le courage et la joie de vivre qu’elle a réussi à conserver tout au long de ces années.

Aujourd’hui encore, nous ne pouvons pas évoquer la période de la greffe sans être au bord des larmes tellement cet événement à bouleverser notre vie.

« Quoiqu’il arrive, garder le Sourire et ne pas baisser les bras » : grâce à maman, c’est une maxime que nous essayons, ma sœur et moi, de mettre en pratique tous les jours.

Sylvie.

Septembre 2006.

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